De réseaux sociaux à réseaux d'intérêts : repenser le contenu

May 2 / Ekedi Kotto Maka

Du lien social à la segmentation par affinités

Les plateformes que nous appelons encore «médias/réseaux sociaux » n'ont plus grand-chose de « social » au sens relationnel. Nous sommes passés, en quelques années, d'une dynamique d'interactions personnelles à une dynamique d'exposition algorithmique, orienté non plus vers les proches, mais vers les centres d'intérêt.

Ce basculement vers des « réseaux d'intérêts » a profondément reconfiguré notre manière de produire, de recevoir et d'interagir avec le contenu. Ce n'est plus l'amitié, mais la similarité de préoccupation qui nous relie. Ce n'est plus la voix de nos cercles, mais celle des algorithmes qui structure notre perception du monde.

Nous vivons dans une fragmentation de l'attention et des vérités

Ce passage du social à l'intérêt a façonné un paysage où les récits se juxtaposent plutôt qu'ils ne se rejoignent, donnant accès à des vérités multiples, souvent en compétition silencieuse. Chacun interagit dans sa bulle de contenus, où les récits sont calibrés pour résonner avec des attentes individuelles.

Le danger n'est pas le chaos, mais la polarisation fluide : les contenus sont optimisés pour conforter, non pour questionner. La persuasion se fait en douceur, par exposition répétée et renforcement cognitif.

Aujourd'hui concevoir du contenu c'est aller vers une posture adaptative et intègre

Dans ce nouveau régime informationnel, produire du contenu ne peut plus être un acte unilatéral ou déconnecté du réseau d'intérêt auquel on s'adresse. Il s'agit de comprendre :
  •  À qui est-ce que je m’adresse et qu’est-ce qui attire leur attention ou les préoccupe ? 

  • Quelle logique de narration est dominante dans ce cercle ?

  • Quel type de contenu circule et se renforce naturellement ?
Cela suppose une posture de clarté et d'écoute stratégique : ne pas chercher à s'imposer, mais à s'insérer avec justesse dans une dynamique existante, sans perdre son axe — c’est-à-dire sa cohérence, son intention, sa direction.

Recommandations pour une pratique alignée avec ce que vous incarnez

  • Produire pour éclairer, pas pour occuper : Évaluez la pertinence perçue de chaque contenu.  Qu'est-ce que cela clarifie ? Pour qui ?

  • Choisir ses réseaux d'intérêts consciemment : Plutôt que de vouloir être partout, mieux vaut habiter pleinement quelques territoires narratifs où votre parole — ou celle de vos partenaires stratégiques — peut être reçue, débattue, assimilée. Dans certains contextes, l'impact ne vient pas d'une prise de parole directe, mais de l'activation de relais pertinents capables de traduire et transmettre avec justesse votre message à un public qui ne vous entendrait pas autrement.Plutôt que de vouloir être partout, mieux vaut habiter pleinement quelques territoires narratifs où votre parole peut être reçue, débattue, assimilée.

  • Favoriser la lisibilité et la lenteur : Dans un environnement saturé de messages, ce qui demeure est ce qui respire. Équilibrez vos formats et valorisez ceux qui permettent la réflexion plutôt que la réaction systématiquement.

  • Observer les signaux faibles : Une posture de veille active vous permettra de sentir les glissements d’intérêt, les mutations de récit, les opportunités de poser une parole nouvelle là où la confusion grandit.

Pour aller plus loin

Ce que nous publions n'est plus simplement un message. C'est un acte de positionnement. Un point d'émission dans un champ perceptif mouvant.

Comprendre les réseaux d'intérêts, ce n'est pas les instrumentaliser. C'est les lire avec justesse, pour y semer une parole qui tient.

Identifier les récits dominants et comprendre leur influence